Près de huit Français sur dix (77%) pensent que la démocratie fonctionne de moins en moins bien (sondage Ipsos-Sopra Steria). Face à ce constat – pas nouveau – la France a adhéré en 2014 à l’Open Government Partnership (OGP), un partenariat international initié par Barack Obama dès 2009, qui encourage le monde à la transparence, à l’ouverture des données publiques et à la lutte contre la corruption grâce au numérique.
L’Open Government Partnership
L’OGP siège à Washington, il est dirigé par un comité directeur de 22 membres, 11 issus de gouvernements, et 11 d’organisations de la société civile. Depuis 2011, 2 500 engagements ont déjà été pris. Le financement de ce partenariat international repose sur des contributions des pays membres, mais aussi sur les apports de fondations privées : Ford Foundation, Hewlett Foundation, ou encore Omidyar Network. La France était le 64eme pays à s’engager à l’OGP qui en compte aujourd’hui 70, et depuis la rentrée, elle en assure la présidence. Chaque pays membre du partenariat doit produire un plan d’action national, et des engagements autour de 3 priorités : l’environnement, la lutte contre la corruption, et la construction de biens communs. Pour assurer le succès de l’initiative, une vingtaine d’organisations de la société civile ont rédigé un guide de l’open gouvernement.
L’ouverture des données en France
Le principe des données ouvertes existe depuis longtemps en France, il est d’ailleurs inscrit dans l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme, qui précise que toute personne peut contribuer à la rédaction de la loi. Mais face à la défiance croissante des citoyens envers les Etats et les institutions politiques, la France, dans le cadre de l’OGP, a mis en en place des moyens pour renouer un dialogue avec eux. Il s’agit, grâce au numérique, d’améliorer la participation citoyenne à l’élaboration des politiques publiques, et d’obliger les acteurs publics à rendre des comptes. Pour ce faire, les gouvernements et collectivités territoriales s’engagent à donner libre accès, en ligne, à des documents et données officielles (qui ne relèvent pas de problématiques de confidentialité). C’est ce que l’on appelle l’ouverture des données ou Gouvernement Ouvert. C’est la mission d’Etalab, mission gouvernementale, chargée de la politique d’ouverture et de partage des données publiques du gouvernement français. Sa plateforme data.gouv.fr met en ligne plus de 13.000 informations publiques gratuites et réutilisables.
Le 4eme sommet mondial de l’OGP controversé
Du 7 au 9 Décembre dernier, se tenait à Paris le 4e sommet mondial de l’Open Government Partnership, au cours duquel des représentants de 70 États ont échangé avec la société civile. Le but de ces échanges était de partager les expériences, bonnes pratiques et progrès en matière de Gouvernement Ouvert. La France souhaitait profiter de ce sommet pour convaincre une dizaine d’États de rejoindre le mouvement, en particulier des pays francophones et d’Afrique. Elle souhaitait aussi inaugurer sa nouvelle boîte à outils numériques ouverte à tous, qui vise à faciliter le partage de ressources et les collaborations.
Mais 11 associations françaises, parmi lesquelles la Ligue des droits de l’homme, Regards Citoyens ou Anticor, ont cosigné un texte où elles pointent les contradictions du gouvernement français en matière de Gouvernement Ouvert. Pour elles, le gouvernement ne sélectionne que les contributions qui l’arrangent, et reste sourd à l’avis des citoyens dès que les questions soulevées ne lui plaisent pas. C’était le cas notamment il y a un an, lors la consultation nationale sur le projet de loi « République Numérique » pendant laquelle les contributions citoyennes plébiscitaient le recours au logiciel libre dans les administrations. A l’issue de la consultation, le ministère de l’Éducation nationale a finalement signé un partenariat avec la société Microsoft pour équiper les écoles. Ils pointent aussi une régression sur les droits humains et les libertés, avec la création du fichier TES (Titres Electroniques Sécurisés), qui représente pour eux un fichage des citoyens portant atteinte à la vie privée.
Mais Martin Tisné, co-créateur de l’OGP, et aujourd’hui conseiller en investissements de Omidyar Network, reste confiant. Pour lui, la meilleure des garanties contre ce genre de dérives est de fixer des évolutions dans les textes de lois, et ces évolutions sont en cours : en 1994 il existait dans le monde 14 lois sur les droits d’accès à l’information publique, elles s’élèvent aujourd’hui à 113.